Classe d’Initiation à la Musique Vietnamienne

Centre Olympiades – Paris 13ème


L’année scolaire 2000-2001 a vu s’ouvrir une classe de musique pour les enfants âgés de 2 ans et demi à 8 ans, à l’Espace Olympiades du Comité Municipal d’Action Sociale  de Paris XIII. C’était mon souhait depuis bien des années. Car en matière d’éducation, l’enfance est une période primordiale. Si les enfants peuvent être initiés dès leur jeune âge à la musique, cette formation sera une base fondamentale pour eux plus tard.     Si nous voulons transmettre la musique traditionnelle populaire, si nous souhaitons enseigner à nos enfants cet art et leur faire perpétuer cette tradition, ils doivent être éduqués dans l’amour du pays natal.

 Nous sommes ici dans un pays de liberté . Les moyens, les conditions pour se divertir ou se cultiver ne manquent pas… ainsi certains enfants pourront même « subir» plusieurs apprentissages. Si les parents , après avoir mûrement réfléchi, savent choisir l’activité adéquate, leurs enfants ne peineront pas trop à apprendre….

 La classe d’initiation à la musique traditionnelle commence à 15h00 jusqu’à 17h30 tous les mercredis après-midi. Pour l’instant elle comprend :

   5 enfants de 2 ans et demi à 5 ans

          –    5 enfants de 6 à 8 ans

                En dehors de cela, il y a 4 enfants de 9-10 ans qui participent aussi aux activités.
Le programme de la classe comprend : l’heure de la musique, l’heure du chant, l’heure de l’écriture Vietnamienne et l’heure des activités, et naturellement aussi l’heure du goûter qui ne peut manquer à cette classe d’âge.
A l’heure de la musique, les enfants font l’apprentissage fondamental sur le « đàn tranh », les percussions. Les enfants de 3 à 4 ans, ne sachant pas encore ni lire ni écrire, se familiarisent avec le son de l’instrument, avec les notes de musique, avec les hauteurs du chant, avant d’apprendre à écrire. Ils connaissent où se situe la première note Sol sur l’instrument, et ils ont pu jouer facilement l’étendue basse des notes du « đàn tranh ».
A l’heure du chant, les enfants font l’apprentissage des chants qui ont trait avec la musique du « đàn tranh », ainsi, ils feront l’apprentissage de la musique sur l’instrument d’une manière plus facile et rapide, car ils connaissent déjà les chants.
A côté des morceaux  de musique fondamentaux du « đàn tranh », il existe des morceaux de chant pour enfants, dont les paroles leur évoquent l’amour du pays natal, comme les paroles, les conseils qui nous sont retransmis depuis des milliers d’années  à travers les berceuses de nos mamans, et de nos sœurs pendant notre propre enfance.
A l’heure des activités, les enfants s’amusent sous la conduite de Minh Hiền, Thanh Trúc qui sont des cheftaines scouts expérimentées, ainsi, les enfants ont pu apprendre l’esprit du scoutisme avec des jeux dans l’esprit de groupe, d’amour, d’entraide mutuelle.
L’heure du goûter est l’heure qu’attendent les enfants, préparé par leurs mamans. Ils ont pu se partager un gâteau, un bonbon, chacun a les siens, ainsi, ils ont pu se régaler de toutes sortes de goûter. Surtout qu’après manger, les enfants ont appris à débarrasser et à rendre propre la salle et continuent à se préparer à d’autres activités nécessaires….
J’ai remarqué qu’auparavant, Phượng Ca avait déjà reçu des enfants en apprentissage, mais chacun avait son cours individuel,  d’ambiance n’était pas aussi bonne que cette classe en commun. Les enfants traînaient à venir aux cours, il leur manquait des copains avec qui jouer, avec qui parler. Depuis qu’il est permis de se retrouver, l’ambiance a complètement changé, les enfants adorent apprendre la musique, ils adorent se revoir chaque mercredi après-midi. Après l’heure des cours, ils s’attachent et ne veulent pas se quitter….
Chaque heure a sa particularité, par exemple à l’heure de la musique, les enfants font l’effort de jouer le « đàn tranh » plus harmonieusement, de façon plus juste, écoutant l’un et l’autre jouer en attendant son tour. A l’heure du chant, ils se battent pour pouvoir chanter le premier à chaque demande du professeur. A l’heure de la récréation, ils s’amusent et s’animent tous ensemble. A la fin du cours, tout le monde est content, détendu, pour rentrer chez soi et se donner rendez-vous au prochain mercredi.
La classe d’initiation à la musique traditionnelle est seulement ouverte depuis cette année scolaire, mais les enfants ont déjà l’occasion de participer au programme « Semaine de l’Asie Année 2000 à Antony » au mois de novembre, à la journée « Porte ouverte de l’Association des Enfants du Soleil Rouge » à Vincennes au mois de décembre et ils se préparent pour aller à la bibliothèque Jean Marie Melville à Paris 13ème au mois de janvier 2001 pour présenter un programme aux enfants du quartier.
Pour évaluer la réussite  de la classe, il faut voir du côté des jeunes mamans de Phượng Ca. A chaque présence aux cours de leurs enfants, elles sont aussi présentes. A part l’heure de musique où seuls les enfants sont autorisés, elles sont là aux autres heures, pour chanter, faire des activités, prendre le goûter avec leurs enfants. Ainsi, ils ont tous le sentiment en venant en classe que leurs mamans sont plus présentes à leur côté.
La présence des mamans permet de mettre en confiance les enfants; ils sont rassurés, ils n’ont pas peur lorsqu’ ils jouent de la musique à côté du professeur. De temps en temps, ils jettent un coup d’œil vers elles, pour voir si elles chantent avec eux. Pour celles qui oublient de chanter, leurs enfants sont déjà là, à le leur rappeler….
Cette classe d’initiation a répondu à mes vœux pour sauvegarder et pour répandre la musique traditionnelle. Il y a une dizaine d’années de cela, quand les premiers ‘phénix’ sont arrivés à l’âge de fonder une famille, à avoir des enfants, je me suis déjà penchée sur ce problème, mais prévoir est une chose, pouvoir le réaliser en est une autre. Ces enfants de Phượng Ca ont maintenant 7, 8, 10, 13 ans. J’ai raté une occasion pour enseigner la musique populaire aux propres enfants des ‘phénix’.
Phưọng Ca n’a pas réussi à éduquer ses propres enfants dans l’esprit de l’amour du peuple, alors pourquoi penser à créer une classe d’initiation pour les autres enfants. J’ai réfléchi comment je n’ai pas pu créer un milieu musical traditionnel aux propres enfants de ceux qui ont collaboré avec moi ???
Cette réflexion doit avoir une réponse : la cause, c’est que les ‘phénix’ font de la musique, du chant traditionnel, mais leur époux ou épouses ne sont pas toujours du même milieu, n’ont pas toujours le même idéal qu’eux. Sans avoir les mêmes aspirations, c’est très difficile pour ces couples de poursuivre le travail de Phượng Ca, ils n’ont pas suffisamment de courage pour emmener leurs enfants en classe une fois par semaine, et attendre jusqu’à la fin des cours. En plus, les ‘phénix’ ne veulent pas que leur mari ou épouse soient tristes, et pour la tranquillité de leur famille, ils doivent se sacrifier, c’est-à-dire qu ‘ils doivent arrêter leurs activités au sein du groupe pendant un moment…cinq ans, ou dix ans, avant de pouvoir revenir.
Maintenant que la classe d’initiation est créée, le rêve est devenu réalité. Les mercredis après-midi sont réservés aux enfants et à leur maman. Les mères et les enfants apprennent à jouer de la musique ensemble, l
es premiers cours de la classe 1 avec l’utilisation de l’index, du majeur, avec les notes Sol, La, Do si simples, les premiers morceaux de musique de la classe « đàn tranh », les paroles du morceau « Thu Hồ », que les mamans chantent, les enfants les chantent également, car si les mamans savent chanter, ainsi elles pourront apprendre à leur enfants à chanter chaque jour :

 Công sách đèn chày ngày rạng danh
Nhọc rồi mới đến hồi thảnh thơi,
Ân đức thầy nhiều ngày dạy khuyên
Lại còn tốn cơm áo mẹ cha….

 Ou les paroles du morceau « Thiên bất Túc » :

  Sáo bay sáo nhảy,
Sáo lại chuyền cành
Sáo lại ca hót,
Liu lo ó o rộn ràng
Cho lòng em vui
Cho trí em thảnh thơi….

    Les chants résonnent forts, tout le centre Olympiades les entend, incitant Thierry, le responsable du centre, à venir voir avec plaisir la classe. A chaque fois que l’heure du chant arrive, il est là, debout à écouter et à vouloir chanter, avec des yeux grands ouverts jusqu’à délectation.
Depuis que cette classe de musique pour enfants existe, tous les midis du mercredi, le centre s’anime avec joie, et tout l’après-midi, on n’entend plus que les chants des enfants Vietnamiens et leurs éclats de rires. Je pense que malgré le bruit, cela fait plaisir aux responsables du centre car les enfants nous ont apporté leur souffle vital, leur jeunesse.
Et quand nous pensons à l’avenir de la musique traditionnelle, nous avons l’impression d’avoir semé les graines de cette musique dans le cœur des enfants d’ici, dès aujourd’hui….      

Phương Oanh.

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